Face à une architecture de plus en plus omniprésente, je m’attache à jouer avec son effacement. Lors de mes déplacements, je photographie des portions d’entrées de bâtiments publics ou privés. Les collages de ces images créent de nouveaux espaces kaléidoscopiques ou de fausses symétries, comme des miroirs qui n’en sont pas. Brouillant les repères concernant l’origine de ces lieux, je dessine directement dessus, les unifiant à travers un langage commun géométrique. En trompe-l’œil, ce voile graphique rappelle la complexité de notre environnement architectural et social.
La terre crue me permet de relever les empreintes d’angles, d’encadrures de portes ou de fenêtres, que ces éléments soient sur place ou décontextualisés. Je travaille sur ces fragments d’architecture, souvent ignorés ou perçus comme de simples composantes fonctionnelles. Ces « trans-sites » deviennent des marqueurs qui permettent de penser simultanément l’intérieur et l’extérieur, même hors de leur contexte initial. Ils évoquent la temporalité : le passé, le présent et le futur, ainsi que les interstices où se glissent les transformations et les traces du temps.
La thématique de la fenêtre s’inscrit dans une réflexion sur le lieu, son usage et sa symbolique.
Vue de l’extérieur, la fenêtre délimite un fragment de réel qui s’offre à la représentation, à la manière d’un cadre pictural. De l’intérieur, l’espace privé perd de son étanchéité, laissant échapper des informations elle ouvre sur un espace autre, donné à contempler ou à imaginer. Mais ce qu’elle montre n’est pas toujours visible, ou seulement partiellement ; elle participe ainsi d’un double jeu entre exhibition et dissimulation, servant de tremplin à l’imaginaire. Réciproquement, ce qui relève du domaine public peut interférer avec le privé et y laisser son empreinte. La fenêtre témoigne ainsi de la réversibilité des espaces.
